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La vie autour d'Handi'Chiens
17 octobre 2011

Histoire d'une grande dame

Voici un article sur "la grande dame" d'Handi'Chiens Marie Claude Lebret
"Le 24 octobre 1995 à 9h00
Marie-Claude Lebret s'est découvert une vocation à 47 ans: elle a introduit en France les chiens d'aide aux paraplégiques. Et éduque, tenace, ses «élèves» dans son lycée agricole d'Alençon. Une femme, des chiens, le handicap

Par AZIZ Germaine

 
 

«C'est une sainte laïque. Elle a la vocation et rayonne d'énergie»,

disent d'elle ceux qui la côtoient. «Elle a une légende personnelle et l'accomplit...» Aurait-on dû écrire la biographie de Marie-Claude Lebret, il y a à peine quelques années, qu'elle aurait tenu en trois lignes. 47 ans, mariée à un conseiller en gestion agricole, mère de deux enfants, professeur de biologie au lycée agricole d'Alençon. Et aujourd'hui, retournement de situation, il ne se trouve pas un thérapeute pour ignorer le travail qu'elle a réussi à imposer: l'utilisation des animaux et leurs effets bénéfiques sur les paraplégiques.

«J'ai pu avoir une chienne pour handicapé grâce à Marie-Claude. Depuis, ma vie a changé. Elle m'ouvre la porte, elle range ma chambre. Le soir, elle dort sur mon lit. Le matin, elle me réveille. Elle est douce.» Le museau de sa chienne sur les genoux, Sébastien, l'enfant myopathe cloué sur son fauteuil roulant, a écrit ces quelques lignes pour remercier la bonne dame d'Alençon.

Marie-Claude a-t-elle une «mission», qui semble toujours avoir les yeux humides, s'interrogent tous ceux qui l'approchent? C'est une véritable vocation qui l'a saisie. Cela lui est tombé dessus ­«comme un éclair»­ sans crier gare un soir de 1989. Elle regardait la télé où s'égrenaient les expériences réalisées aux Etats-Unis avec les chiens éduqués pour aider les handicapés physiques. Depuis vingt ans déjà, s'est développé outre-Atlantique un nouveau type de thérapie: les helper dogs. Formés par la CCI (Canine Companion for Independance), association créée par la psychothérapeute Bonita Bergin, ces chiens «suivent des cours» pour apprendre à assister les handicapés mentaux et physiques dans leur vie quotidienne. Certains sont spécialisés dans l'aide aux sourds: éduqués pour réagir à certains bruits familiers à la place du maître, ils jouent un rôle d'avertisseur. Les Britanniques, en particulier, ont commencé de se spécialiser dans ces «chiens écouteurs». Last but not least, le chien peut être aussi un «aide-thérapeute» pour les enfants autistes ou schizophrènes, en leur apportant un fort soutien affectif.

En France, fin des années 80, on connaît les chiens guides d'aveugles, pas les chiens d'assistance aux infirmes. Marie-Claude Lebret envisage immédiatement, elle, d'introduire ce type d'animation avec chien dans son lycée agricole d'Alençon. L'idée plaît au proviseur. Encouragée par ses élèves en biologie, elle décide de partir en stage aux États-Unis, avec une seule obsession: tout apprendre puis tout importer de la méthode sur notre Vieux Continent. Après deux séjours, sa nouvelle orientation lui ouvre les yeux sur un monde insoupçonné, celui où le chien devient un véritable alter ego: «Même s'il a une famille, un handicapé connaît une grande solitude. La communication est difficile, c'est le chien qui fait les avances dans la rue. Les gens vont parler du chien, s'adresser au chien, et ensuite parler à l'infirme. Les chiens sont très proches de l'homme, très affectueux, toujours en quête d'une caresse, et l'animal cache le fauteuil», explique l'éducatrice.

En 1991, les quatre premiers chiens étaient remis par Marie-Claude Lebret à des personnes handicapées. En 1995, elle en est à son centième chien. «J'aime enseigner la vie du chien, le travail du chien, transmettre. Et je suis tellement heureuse quand je reçois un sourire en échange.» Son travail ne se borne pas à faire don d'un animal à un handicapé. Elle s'efforce de trouver les personnalités qui s'accordent. Le malade est dans une attente telle qu'il communique sa joie à son compagnon. «Entre eux naît une histoire d'amour qui ne s'éteint qu'avec la mort de l'un d'eux», dit-elle.

Au lycée agricole d'Alençon, Marie-Claude et quarante bénévoles ont éveillé des vocations chez les élèves. Depuis peu, on y reçoit des enfants autistes le jeudi et le vendredi. «Au début, raconte Marie-Claude, les enfants s'automutilaient, ils n'avaient pas de repères. Maintenant, ils disent bonjour à leur façon, ils frottent leur nez contre ma joue, et il y a des chiens entre nous, ils sont sereins.» C'est une première expérience et elle se propose d'élever désormais quelques chiens, tout spécialement en vue des enfants autistes, prenant ainsi exemple sur Boris Levinson, psychiatre américain, qui, le premier, en a fait l'expérience à Philadelphie il y a une vingtaine d'années.

Pendant longtemps, Marie-Claude n'a pas parlé de son travail à Vingt-Hanaps, son village de 400 habitants. Mais un jour, monsieur le maire lui a demandé une démonstration, avec ses élèves à deux et quatre pattes. Les habitants en ont été si ravis qu'ils l'ont élue «citoyenne d'honneur».

Pas une goutte d'eau ne vient ternir cette image lisse: ni épouse malheureuse, ni mère frustrée. Qu'on la rencontre au palais des Congrès à Montréal, en élève attentive, à New York où ses deux premiers chiots labradors lui furent offerts par un spécialiste américain, ou encore à Genève, où ses fans avaient récemment pris la salle d'assaut, lors du 7e congrès des thérapies hommes-animaux (1), on voit à ses côtés trottiner son mari, sourire admiratif aux lèvres. Et ses enfants l'épaulent à fond, elle tient à le dire: «Je n'aurais jamais pu réussir sans le soutien de ma famille et de mes amis.» C'est que Marie-Claude Lebret ne sera jamais blindée. Son émotion reste toujours intacte. Chaque fois qu'elle marie un humain et un animal, «je ne peux pas retenir mes larmes», avoue-t-elle."

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